Comme si que on disait que on faisait la guerre (1)

Acte I. Dummie tanks for dummies.

La ruse, la simulation, la tromperie, vieilles compagnes roublardes de la guerre ont déjà démontré leur efficacité. Embrouiller l'adversaire sur l'effectif de chair à canon qu'il va devoir se préparer à affronter est une vieille technique : fusils et canons de bois (Quaker guns [en]) pendant la Guerre d'Indépendance des É.-U., chars gonflables durant la 1ère Guerre Mondiale.


Aujourd'hui, les leurres gonflables restent d'ailleurs, très probablement, la partie la plus populaire de cette doctrine de l'entourloupe puisque la technique, aussi primitive soit-elle, est toujours appliquée (cf. EnglishRussia.com, ci-contre). On pourrait éternellement se refiler des photos de ces armements de baudruche, on ne lasserait jamais, goguenards, de la naïveté de la manœuvre...

C'est que, sorti du contexte, on ne perçoit probablement pas leur potentiel stratégique. Durant la 2nde Guerre Mondiale, pourtant, ils ont fait partie d'une panoplie de moyens sur laquelle les hauts commandements en présence se sont souvent reposés. La célèbre Opération Fortitude témoigne des efforts des Alliés pour mettre l'occupant Nazi sur de fausses pistes durant la préparation du D-Day, et la littérature sur le sujet ne manque pas (L'Arme à l'œil, de Follett). Cependant la désinformation ne cessa pas après ce jour fatidique, et c'est ici, à mon avis, qu'on touche au surréalisme avec l'histoire de la Ghost Army.

C'est tellement beau qu'on croirait presque voir un canular; hélas, les militaires ont prouvé dans d'autres domaines qu'ils savaient faire montre de la créativité requise.
La Ghost Army était un corps composé d'un millier d'hommes, envoyés en juin 1944 en France avec la mission très spéciale de simuler l'existence de troupes stratégiquement cruciales. A mission spéciale, militaires spéciaux : les Ghost Soldiers ont été recrutés dans les sphères assez inhabituelles du monde artistique.
Photographes, stylistes, publicistes, les Alliés se dotaient ainsi à la fois d'une force de frappe experte, et d'un véritable think tank dédié à l'art de la tromperie. Après leur participation à Fortitude, ils effectuèrent une sorte de tournée en France, mettant en scène une vingtaine de théâtres d'opération totalement fictifs, spectacles donnés à l'intention de l'occupant allemand et de ses «sympathisants» locaux. Les moyens développés, on le verra, restaient dans le droit fil des tanks gonflables : simples, mais efficaces du fait des talents mis en œuvre.

A suivre.